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Comment booster la mémoire de travail du musicien

 Il faut être honnête.

Apprendre un instrument, ce n’est pas facile.

Tellement de choses que vous devez garder en tête :

=> Soigner chaque geste que vous jouez
=> Tout faire pour que le geste traduise vos émotions
=> Anticiper les notes et les gestes qui arrivent
=> Chasser les pensées parasites comme « Qu’est-ce que je vais préparer à manger tout à l’heure ? »

C’est clair !
Vous êtes mis à rude épreuve et votre mémoire de travail aussi.
D’ailleurs, c’est presque pire quand vous apprenez de nouveaux morceaux…

En tant que musicien, votre mémoire de travail est LA chose
à domestiquer
 pour vous épanouir. C’est vrai dans votre apprentissage comme dans l’expression de vos sentiments.

Car, si vous ne respectez pas ses limites, gare à vous !  
Ce sont vos projets musicaux qui seront limités.

C’est comme pour votre corps.

Demandez aux musiciens qui se sont blessés.
On ne fait pas envie quand on contemple son instrument les sourcils froncés avec un pincement au cœur.

Bien sûr, vous ne pouvez pas blesser votre mémoire de travail.

Mais si vous ne la soignez pas, vous gâchez en partie toute cette belle énergie que vous investissez dans votre apprentissage.
Car vous prenez des risques.

Comme ne pas réussir à jouer ce classique qui vous fait saliver.
Ne pas développer cette aisance technique que vous enviez secrètement à d’autres musiciens.

Et quand vient l’heure de monter sur scène, n’en parlons pas…
Cela peut vite tourner à la catastrophe.

Pourtant, votre mémoire de travail n’est pas une obscure machine pleine de boutons compliqués que l’on craint d’approcher.

Non !
Son fonctionnement est simple à comprendre.
Et les astuces pour la respecter, faciles à mettre en œuvre.

Alors, pourquoi s’en priver ?
C’est tellement plaisant d’arriver à faire résonner
la musique que l’on entend intérieurement.
De jouer quelque chose de beau.

Vous êtes d’accord, n’est-ce pas ?

Alors, lisez cet article pour comprendre et respecter votre mémoire de travail. Vous vous direz merci plus tard.

Et à moi aussi peut-être ! 😉

Qu’est-ce que la mémoire de travail ?

Prenons des métaphores simples.

La mémoire de travail, c’est le chef d’orchestre qui dirige simultanément tous ses musiciens.

C’est la mémoire vive de votre ordinateur.
Vous savez, celle qui fait que tout va au ralenti lorsque vous avez 20 fenêtres web d’ouvertes et deux programmes d’enclenchés.

Tout dépend d’elle.
Et si elle bug, rien ne va plus.

Si le chef d’orchestre s’embrouille, chaque musicien jouera sa petite mélodie dans son coin.
Et la symphonie devient vite une cacophonie…
Un capharnaüm sonore qui donne envie de se boucher les oreilles.

Mémoire de travail : Modèle de Baddeley

Voyons comment les sciences cognitives définissent la mémoire de travail.
Voici le modèle de Baddeley, un modèle simple né à la fin des années 70.

Pour faire simple.
Il y a un chef d’orchestre, appelé « administrateur central ».
Et ce chef d’orchestre dirige 3 sous-systèmes.

Un des sous-systèmes est appelé « boucle phonologique ».

Cette boucle phonologique vous permet de vous rappeler de la dernière phrase que l’on vient de dire pendant que vous regardiez votre smartphone. ^^
Ou de vous répéter mentalement un numéro de téléphone le temps que vous trouviez de quoi le noter.

En bref, vous faites tourner en boucle des informations dans votre tête. D’où son nom !

Un autre sous-système vous permet de garder une image en mémoire.
Comme dans le jeu où vous êtes devant des cartes étalées avec la face cachée.
Et où vous devez retrouver les paires de cartes similaires en ne retournant qu’une seule carte à la fois. Vous voyez de quoi je parle ?

Ce sous-système s’appelle le « calepin visuo-spatial ».

Et le dernier sous-système vous permet de faire travailler main dans la main les deux systèmes précédents tout en gardant des consignes en mémoire.

C’est le « tampon épisodique »,  ajouté au modèle de Batteley par ses auteurs dans les années 2000.

D’autres modèles de mémoire de travail un petit peu différents ont vu le jour depuis.
Aujourd’hui, les chercheurs s’accordent à dire que la mémoire de travail
est composée de 4 processeurs qui travaillent en synergie.

Quoi qu’il en soit, tous ces modèles sont d’accord pour dire que votre mémoire de travail a les caractéristiques suivantes.

Caractéristiques de votre mémoire de travail

Dites-moi.
Que se passerait-il si vous tentiez de garder un numéro de téléphone en tête,
mais en vous interdisant de le répéter ?  Mentalement ou à voix-haute…

Et oui !
Vous l’oublieriez rapidement.

Une autre.
Que se passe-t-il si je vous demande de garder une liste de 4 chiffres en mémoire.

Ça va, ce n’est pas trop dur !
Vous allez y arriver.

Mais si je rajoute 20 chiffres à la liste.
Que se passe-t-il ?

Haha !
Cela devient drôlement moins facile là…

Et enfin, calculer de tête 47×53.
Qu’est-ce que cela donne ?

Votre front se plisse ?
C’est dur de calculer mentalement tout en conservant des informations en tête. N’est-ce pas ? Cela mobilise beaucoup de ressources

Vous l’avez compris.

Votre mémoire de travail a des limites.
En durée et en quantité.
Et si vous lui en demandez trop, elle bug !

Pendant mes études en sciences cognitives à l’Université Lumière Lyon 2,
les professeurs expliquaient que la mémoire de travail a les propriétés suivantes.

Elle peut retenir 7+/-2 éléments (entre 5 et 9, selon les personnes) pendant 20 à 30 secondes.
Mais si vous vous répétez mentalement ces informations, elles resteront plus longtemps dans votre tête bien sûr !

Barbara Ocklayprofesseur d’ingénierie dans les Universités Mac Master et d’Oakland compare la mémoire de travail à un mauvais tableau magique.

Tout ce que vous écrivez dessus est constamment en train de s’effacer doucement.
Et si vous ne voulez pas que cela disparaisse totalement, pas le choix !
Il faut le réécrire sans cesse
Pas pratique, hein ?

Alors, vous avez tout compris jusque-là ?
Je vous l’avais dit, c’est simple ! 😉

Voyons maintenant comment la mémoire de travail intervient dans votre pratique de musicien.

Mémoire de travail et pratique musicale

Les 3 fonctions de la mémoire de travail chez le musicien

Chez nous les musiciens, la mémoire de travail nous sert principalement à 3 choses.

1) Elle permet de faire revenir des informations en tête depuis la Mémoire à Long Terme (MLT)
Elle permet également de garder à l’esprit ces informations.
Exemple : quand vous vous remémorez une grille d’accords ou la partition d’une sonate.

2) Elle permet ensuite de conserver des consignes et des intentions
à l’esprit
.
Exemple : lorsque j’ai l’intention d’être très précis rythmiquement et de garder les mains souples et détendues pendant que j’enchaîne des accords.

3) Elle permet également d’effectuer ces processus.

Des processus physiques :
Comme quand je me focalise sur le fait de ressentir le premier temps de chaque mesure et que je me concentre sur mes mains pour les garder précises et relaxes.

Et des processus mentaux :
Comme quand vous improvisez tout en réfléchissant aux différentes possibilités que vous offre la tonalité dans laquelle vous vous trouvez.

Tout est clair ?

Voici un schéma qui récapitule quel rôle a la mémoire de travail quand vous jouez de la musique.

Les 2 moments dans lesquels la mémoire de travail intervient

Vous vous en doutez.
Dans votre pratique musicale, votre mémoire de travail intervient à différents moments.

Lorsque vous travaillez votre instrument et lorsque vous jouez devant un public.
Voyons ensemble comment tout cela se passe.

Mémoire de travail et travail de l’instrument

Je viens à l’instant de faire une petite pause dans l’écriture de l’article
que vous êtes en train de lire.

J’ai déscotché mes yeux de l’écran et mes mains du clavier sur lequel elles tapotaient en rythme continu depuis un sacré moment.

Une fois dans mon salon, j’ai pris ma guitare et j’ai commencé à jouer debout, les yeux plongés dans l’eau verte de la Saône que je vois depuis ma fenêtre.

Et là, comme un singe qui se balance de liane en liane, mon esprit sautait d’une intention à une autre, puis à une troisième pour revenir à la première.
Le tout, dans une danse continue qui pourrait donner le tournis.

1) Je pensais à bien sentir mes pieds, ancrés dans le sol.

2) Je visualisais ma colonne vertébrale et ma tête étirées vers le ciel pour que mon corps prenne de la place et libère l’espace autour de ma gorge et de ma nuque.

3) Je tâchais d’enchaîner des barrés en équilibrant la pression musculaire dans tous mes doigts, afin de démobiliser un peu la « pince pouce-index » de ma main gauche.

Et d’un coup, je me suis dit : « Il faut que parle de cela dans l’article ! » 😉

En effet, ma petite histoire contient un concept important.

Une règle pour apprendre la musique efficacement

Dans sa ronde sans fin, ma mémoire de travail sautait d’une intention à l’autre, en effectuant les ajustements nécessaires à chaque passage.
Détendre la pince pouce-index, me ré-ancrer dans le sol, etc.

Mais si elle pouvait faire cela, c’est uniquement parce que ces consignes étaient déjà parfaitement définies et réalisables !

Je sais ce que je veux ressentir quand j’ai l’intention d’être ancré.
Et je sais comment y parvenir.

Vous me suivez ?

Si j’avais commencé à réfléchir à « Tiens comment cela fait d’être ancré ? » ou à « Bon sang, comment faire pour sentir plus d’ancrage ?», quel résultat cela aurait donné selon vous ?

Et oui !

J’aurais complètement perdu le contact avec l’instant présent.
Et j’aurais dit « Bonjour, mon ami le pilote automatique ! »
Et son cortège de défauts appris, par manque de présence, qui ralentissent mes progrès…

Retenez le bien !

Dès que vous travaillez vous devez connaître très précisément vos intentions du moment et comment les réaliser !

Je répète :
« Dès que vous travaillez vous devez connaître très précisément vos intentions du moment et comment les réaliser ! »

Sinon, c’est comme quand vous calculez de tête 47×53.

Si jamais à cet instant votre conjoint(e) vous pose une question simple qui ne demande qu’un petit chouilla de réflexion.

BOOM !

Votre tête risque d’exploser comme une voiture dans un vieux film de série B américain.

On est d’accord ? Mais pourquoi ça ?

Vous le verrez dans la deuxième partie de cet article.
Il me semble que vous avez déjà de quoi faire là, non ?

Si vous voulez en savoir plus sur la mémoire et comment mémoriser pour la vie rapidement et efficacement, cliquez-ici !

Si vous avez des remarques, des anecdotes ou des questions sur le sujet, écrivez-les dans les commentaires !

Avec confiance et motivation 😉

Roman Buchta

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  • Pierre-Favre dit :

    Le modèle de baddeley est super clair. Un vrai plaisir de le découvrir avec des mots simple et des illustrations pertinentes.
    Jouer d’un instrument semble effectivement d’une grande complexité pour notre cerveau, de la coordination à l’anticipation et la concentration sur ses émotions. Il y a quelque chose de de quasi magique.

  • LILIANE dit :

    Le début est assez technique mais après cela devient plus concret et plus clair merci !

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